Depuis longtemps, j’avais envie de visiter le Grand Théâtre de Bordeaux. Les colonnes majestueuses de son péristyle et les 12 muses de sa façade m’intriguaient. N’ayant pas pu visiter ce monument lors des dernières Journées du Patrimoine, je me suis offert une petite visite guidée pour découvrir les coulisses de son architecture et l’intérieur de ce monument emblématique de Bordeaux.
Au cœur de la capitale girondine, le Grand Théâtre se situe dans l’élégant « Triangle d’Or », quartier composé des places Gambetta, Tourny et de la Comédie. Le bâtiment a été construit non pas dans l’alignement d’une rue (en l’occurrence l’artère Sainte Catherine), mais légèrement décalé, de manière à créer un parvis. Ainsi, le théâtre pouvait (et peut toujours) être admiré des passants en prenant du recul et l’esplanade permet une déambulation importante.
Victor Louis, architecte talentueux mais impopulaire
Le Grand Théâtre de Bordeaux, aujourd’hui classé monument historique, a été bâti juste avant la Révolution Française. Son architecte, Victor Louis, un Parisien surdoué, est le fils d’un maçon tailleur de pierres. C’est un élève brillant et précoce qui entre à l’école royale d’architecture avant l’âge réglementaire des 16 ans.
À l’issue de ses études, il obtient la médaille d’or à un concours lui ouvrant les portes de la Villa Médicis à Rome, où il passera cinq années. Son séjour italien influencera la plupart de ses travaux tout comme le métier de son père. Ainsi, le Grand Théâtre de Bordeaux d’architecture néo-classique, inspirée baroque, est bâti de pierres. Cette pierre de taille blonde si caractéristique de la région.
Au XVIIIe siècle, Bordeaux est en plein essor, sa démographie explose et un théâtre imposant manque pour renforcer le prestige de la capitale de la Guyenne. Victor Louis, apporte donc cette nouvelle dimension à la ville. Après 7 années de travaux, le Grand Théâtre s’impose comme un des bâtiments incontournables, témoignant de l’opulence de la ville. Pourtant, Victor Louis était un architecte impopulaire, surtout aux yeux des Bordelais qui voyaient en lui un arriviste parisien. Victor Louis ne fut d’ailleurs pas invité à l’inauguration de son œuvre en avril 1780. Et ce n’est que 100 ans plus tard qu’on tailla une statue à son effigie. On peut apercevoir cette sculpture dans le vestibule du Grand Théâtre.
Composition architecturale du Grand Théâtre de Bordeaux
Après avoir gravi quelques marches à l’extérieur, on peut admirer les colonnes corinthiennes et le plafond composé de caissons sculptés. Puis, on pénètre dans le théâtre.
Le hall d’entrée
Dans le hall, l’architecte a voulu reproduire une ambiance sacrée : un style épuré avec 16 colonnes faisant référence aux temples grecs. Les muses et déesses antiques de la façade du théâtre et celles que l’on retrouve dans le grand escalier, font aussi référence à la Grèce et à Rome. Hasard ou coïncidence, il faut aussi noter que le Grand Théâtre de Bordeaux se situe sur l’emplacement d’un ancien forum gallo-romain.
L’escalier d’honneur situé dans le hall est un des éléments marquants du Grand Théâtre de Bordeaux. Il a d’ailleurs inspiré Charles Garnier pour la réalisation de celui de l’opéra de Paris. Une colonne vertébrale orne la rampe de ce grand escalier qui se divise en deux. Il débouche sur une porte imposante encadrée des muses représentant la tragédie et la comédie.
Le Grand Théâtre de Bordeaux compte bon nombre d’escaliers avec au total 2 400 marches !
Stendhal qualifiait la construction du Grand Théâtre de « pavé austère ». Pourtant, l’architecture de Victor Louis alterne pleins et vides. À cette époque, les spectacles ont lieu en journée, en cours d’après-midi, plutôt qu’en soirée comme c’est le cas aujourd’hui. Le vestibule et les balcons de la cage d’escalier ont donc été conçus pour être exclusivement éclairés de manière naturelle, grâce à un dôme. Des éclairages électriques y ont été ajoutés depuis.
La salle de spectacle
La salle de spectacle principale était réservée aux pièces de théâtres et opéras. C’est une salle à l’italienne, c’est-à-dire en forme de fer à cheval. Car à l’époque, il était aussi important de voir le spectacle sur scène que d’être vu !
Elle peut aujourd’hui accueillir plus de 1 100 spectateurs. Le grand rideau de la scène en trompe l’œil est en bois afin de favoriser une bonne acoustique. Les couleurs de cette salle reprennent celles de la royauté : bleu, blanc et or.
La salle a été restaurée en 1992, mais la machinerie du XVIIIe siècle existe encore sous la scène. Lors de ma visite, des répétitions étaient en cours et je dois avouer que ce petit moment où le piano résonne dans cette salle immense est assez magique.
Les salons de réception
À l’étage, le salon de réception a été construit plus tard, en 1855. Il servait de salle de concert et comportait autrefois deux balcons donnant sur un parquet ovale où prenaient place les musiciens. La salle est de style empire et comporte les portraits des compositeurs qui étaient à la mode à cette époque. On notera que Jean-Sébastien Bach ne fait pas partie de la galerie de médaillons, tout simplement car il était méconnu lors de la construction de cette pièce. Cette salle, restaurée en 2009, accueille aujourd’hui des conférences et des séminaires privés.
Au même étage, de part et d’autre du bâtiment, on trouve deux autres salons. Le foyer d’hiver, que j’ai pu voir lors de ma visite, se trouve toujours « dans son jus » car il n’a pas encore trouvé de mécène pour le restaurer, et c’est bien dommage. Son orientation sud lui permettait d’accueillir les réceptions en hiver. Dans ce foyer d’hiver, on découvre un portrait de Victor Louis travaillant sur les plans du Grand Théâtre. Cette visite guidée ne permet pas de voir l’autre salon.
Visiter le Grand Théâtre de Bordeaux
Le Grand Théâtre est une scène nationale qui offre au public une programmation riche toute l’année. C’est aussi l’un des rares théâtres en Europe à concevoir ses propres décors, costumes et mises en scène.
Ici, ce sont plus de 400 personnes qui œuvrent à l’année (services administratifs et corps orchestral inclus). C’est l’une des particularités de cette scène bordelaise.
La visite dure 1h et coûte 6 euros. Elle est gratuite pour les moins de 26 ans. Il faut la réserver au préalable en appelant le 05 56 00 85 95 ou acheter directement votre billet en ligne. Il est possible de visiter le Grand Théâtre toute l’année. Cependant, les horaires et jours de visite sont fonction de la saison.
L’accès au Grand Théâtre peut se faire en tram (ligne B).
Lors de ma visite, j’ai regretté que le groupe fasse plus de 20 personnes. Cela ne permet malheureusement pas de toujours bien entendre ce que raconte le guide ni de voir correctement les détails. En plus, si on tombe sur des personnes mal élevées qui vous poussent pour « voir en premier », j’avoue que ça gâche un peu la visite. Mais je suis tout de même ravie d’avoir enfin pu découvrir ce monument et j’ai hâte de pouvoir assister à une pièce, un ballet ou un opéra dans ce lieu magnifique.
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