Brésilienne arrivée en France en 2010, Belisa est architecte de formation et ancienne danseuse par passion. Désormais prof de Yoga à Angoulême, elle nous explique comment sa pratique a progressivement transformé sa vision du monde et l’a accompagnée dans tous ses voyages : Brésil, Royaume-uni, Portugal… Nous lui avons demandé de nous parler de son Brésil natal, l’état du Piauí et de l’endroit où elle a découvert sa vocation : le pittoresque village de Pirenópolis, dans l’état de Goiás. Des territoires encore méconnus, mais qui regorgent de trésors et qu’elle s’attache à promouvoir à travers son projet « Jatobá Design ». Découvrez son univers et ses bonnes adresses en 10 questions !

1. Bonjour Belisa, qui es-tu, que fais-tu de beau dans la vie et d’où viens-tu?

Belisa Evangelista : Bonjour Magali ! Je dirais que je suis une “âme voyageuse”, qui se sent « à la maison » dans 3 pays et qui est à la recherche de la beauté de la simplicité… La simplicité est si complexe et difficile à atteindre ! J’ai d’abord approché ce concept lors de mes études en architecture. Depuis, je suis constamment en quête d’une simplicité esthétique et spirituelle, à la fois dans mon mode de vie et de consommation. Que c’est dur ! C’est le Yoga qui m’a encore plus amenée vers cette philosophie de vie.

Petite session yoga face au paysages sauvages des alentours de Pirenópolis

Petite session yoga face au paysage sauvage des alentours de Pirenópolis

Aujourd’hui, je ressens le besoin de transmettre aux autres la transformation intérieure que le yoga m’a progressivement apportée. Si j’arrive à aider les gens qui cherchent eux aussi cette transformation avec mes petits moyens, c’est alors ce que je fais de beau dans la vie ! En parallèle à la vie d’enseignante de yoga – et à la vie de maman – je développe depuis 2014 le projet Jatobá Design, dont l’objectif est la diffusion en France du patrimoine culturel et naturel du Brésil.

Tasse en céramique ©Jatobá Design

Tasse en céramique fabriquée de manière artisanale, éthique et équitable au Brésil ©Jatobá Design

À travers cette marque de design artisanal contemporain, nous proposons des céramiques et des bijoux issus d’une fabrication entièrement artisanale au Brésil, en matières d’origine naturelle et locale, dans le respect des principes du commerce éthique et équitable. Les objets que j’ai sélectionnés sont directement liés à mon environnement et à mes racines. Ils s’inspirent de la nature, de l’histoire et du savoir-faire brésiliens.

Ces deux projets sont arrivés comme conséquence de mes deux anciennes activités, que je pratiquais aussi en parallèle, avant de venir en France. La danse s’est développée dans le yoga ; l’architecture, elle, s’exprime à travers Jatobá Design.

Mes racines au Brésil

Je suis originaire de l’état du Piauí, qui se trouve en quelque sorte « coincé » dans une zone de transition entre la région amazonienne à l’ouest et la région semi-aride appelée Sertão à l’est. (En général, les gens pensent que l’Amazonie couvre la totalité du territoire brésilien mais ce n’est pas vrai : il y existe 6 écosystèmes bien différents, comme vous pouvez le voir sur la carte).

Les 6 écosystèmes du Brésil © Jatobá Design

Les 6 écosystèmes du Brésil © Jatobá Design

Le Piauí est effectivement méconnu, pourtant il cache de nombreux trésors ! Ses paysages, ses ressources naturelles et son patrimoine archéologique sont encore très peu explorés.

Je suis née à Teresina, la capitale du Piauí, au sein d’une famille géante et accueillante, où l’on vit dans une ambiance toujours très festive et chaleureuse – bon, la chaleur, ce n’est pas ce qui manque par là-bas : il fait trop chaud toute l’année ! À l’age de 5 ans, j’ai emménagé avec mes parents et mes deux sœurs à Brasília.

Même si c’est la capitale, Brasília est elle aussi méconnue, comparée à Rio de Janeiro, l’ancienne capitale. Par contre, les « initiés » le savent, Brasília est une ville unique au monde, un joyaux de l’architecture et de l’urbanisme moderniste, une source d’inspiration inépuisable pour les architectes, designers, photographes, etc.

Je viens donc de deux villes très récentes, Teresina et Brasília, qui ont été fondées, l’une en 1852 et l’autre en 1960, à partir des dessins d’un projet urbanistique, au milieu de rien. Cela doit avoir une incidence dans ma construction personnelle…

2. Quels sont les lieux de voyage qui t’ont le plus marquée et pourquoi ?

B. E. : Très tôt, j’ai pris le goût du voyage, c’est la faute de mes parents ! Quand j’ai vu l’article que vous avez partagé récemment Le besoin de voyager serait lié à un gène, je me suis tout de suite identifiée. Par contre, mes deux lieux de voyage les plus chers ne sont pas très loin de chez moi.

Le premier, le littoral du Piauí, a marqué toute mon enfance et mon adolescence. J’y allais deux fois par an et je continue à y aller une fois tous les deux ans.

Les paysages très particuliers du littoral du Piauí ©Felipe Mendes

Les paysages très particuliers du littoral du Piauí ©Felipe Mendes

Le deuxième, Pirenópolis, près de Brasília, représente un tournant dans ma vie. J’y ai travaillé pendant deux ans dans l’équipe qui a coordonné les travaux de restauration architecturale de monuments du 18ème siècle. C’est là que j’ai découvert le yoga. J’ai besoin de revenir à ces deux endroits-là souvent, c’est un vrai retour aux sources.

Pour compléter la liste, je cite la Serra da Capivara, au sud du Piauí. C’est en visitant l’atelier de céramique qui se trouve là-bas qu’a germé l’idée de Jatobá Design.

3. Quels conseils pourrais-tu donner aux voyageurs qui aimeraient découvrir ces régions (le Piauí et les alentours de Brasília)? As-tu des bonnes adresses à recommander ?

B. E. : Oui, bien sûr ! Mais attention, pour partir dans ces endroits-là, il faut avoir un certain esprit aventurier ! Vous vous retrouvez en pleine nature native, pratiquement intacte, stupéfiante.

Pour visiter

Parc National Serra da Capivara, dans l’état du Piauí

Il s’agit d’une réserve naturelle de 130 000 hectares où l’on trouve la plus grande concentration au monde de sites archéologiques contenant des peintures préhistoriques. Il présente les plus anciens vestiges de la présence humaine sur le continent américain, datant de 50 000 ans. Pour sa valeur culturelle, ces sites sont inscrits au Patrimoine de l’Humanité de l’UNESCO.

Belisa en mode contemplatif à la Serra da Capivara ©Rosana Evangelista

Belisa en mode contemplatif à la Serra da Capivara ©Rosana Evangelista

La fondation qui s’occupe de la préservation du patrimoine du parc est fortement engagée dans l’inclusion de la population locale dans ses activités, depuis le début des recherches scientifiques. Parmi ses actions d’éducation et de professionnalisation, il y a le projet de l’atelier de céramique artisanale, lancé en 1992 avec le soutien de l’institution italienne Terra Nuova.

La « Cerâmica Serra da Capivara » emploie une quarantaine de villageois et produit environ 6000 pièces par mois. Ce projet favorise le développement économique dans une communauté à faible revenu, isolée au “Sertão” du Brésil.

Pour visiter le Parc, je vous recommande de vous faire accompagner d’un guide local. Vous pourrez trouver leurs contacts dans votre hébergement. Pour en savoir plus : Parque Nacional Serra da Capivara.

Museu do Homem Americano

A coté du Parc, il s’agit d’une structure muséologique de grande qualité qui présente la collection archéologique de la Serra da Capivara et les résultats des recherches de l’équipe franco-brésilienne.

Barra Grande, dans l’état du Piauí

Le paradis des amateurs du kitesurf, mais pas que ! Pour moi, c’est tout simplement la plage idéale.

Belisa et Marco dans la lumière de fin de journée sur la plage de Barra Grande ©Felipe Mendes

Belisa et Marco dans la lumière de fin de journée sur la plage de Barra Grande ©Felipe Mendes

Il y a plusieurs « pousadas* » très sympas, mais je vous indique la Pousada Ventos Nativos, tenue par un jeune français, Mathieu Crégut (voici son mail). Pour ceux qui préfèrent un cinq étoiles : Pousada Chic (site en français). *Pour info, la « pousada », c’est le « bed and breakfast » du Brésil. Elles peuvent néanmoins aller du très rustique jusqu’au vrai luxe.

Pirenópolis, dans l’état de Goiás

A environ 150km de Brasília, un village pittoresque, redécouvert par les hippies dans les années 70. Son architecture coloniale est particulièrement bien préservée.

Belisa et ses deux yogini Clarice et Marco devant l'église de Pirenópolis

Belisa et ses deux enfants Clarice et Marco devant l’église de Pirenópolis

Parmi les nombreuses et agréables pousadas, je cite celle où j’ai d’abord habité avant de louer une maison : le Pouso do Frade.

Parc National Chapada dos Veadeiros, dans l’état de Goiás

Plus spécifiquement les villages de São Jorge (à 240km de Brasília) et de Cavalcante (à 320km de Brasília). Sans vouloir être répétitive ou entrer dans les clichés, cette réserve naturelle est tout simplement un paradis. Le refuge de quelques habitants de Brasília en quête de communion avec la nature ! A São Jorge et à Cavalcante, les portes d’entrée du Parc, vous trouverez des petites pousadas rustiques mais confortables et surtout très charmantes.

Chapada Imperial, dans le Distrito Federal

A 50km de Brasília, une autre réserve naturelle, dans une propriété particulière qui abrite 30 chutes d’eau : chapada imperial.

Pour se loger et manger

Albergue Serra da Capivara

Dans le village de Barreirinho, à coté de l’atelier de céramique et immergé dans un paysage imposant. Tout est très simple. Le restaurant sert le petit déjeuner, le déjeuner et le dîner. Vous découvrirez la cuisine régionale fait-maison.

Pousada e Camping Pedra Furada

Dans le village de Sítio do Mocó, avec une belle vue de la Serra da Capivara. Oubliez les infra-structures des campings français, ici vous trouverez une rusticité authentique et une vraie proximité avec la nature.

Pour se déplacer…

Dans le tout nouvel Aéroport Serra da Capivara, la compagnie aérienne Piquiatuba offre des vols réguliers deux fois par semaine, à partir de Teresina, dans un avion Cessna avec capacité pour 9 passagers. Sinon, il y a des routes en bon état (oubliez les références des autoroutes européennes, par contre !), à partir de Teresina jusqu’à la ville Coronel José Dias, à coté du Parc Serra da Capivara (520km).

4. Qu’est-ce qui t’as amenée vers le yoga ?

B. E. : Arrivée à Pirenópolis début 2005,  comme il n’y avait pas de cours de danse, j’ai commencé à faire du yoga. C’était l’activité la plus proche. Au bout des premières séances, je ne pouvais plus m’en passer ! J’ai continué à pratiquer quand je suis revenue à Brasília, puis pendant mon année au Royaume-Uni et enfin à Angoulême.

Yoga à Pirenópolis ©Felipe Mendes

Yoga à Pirenópolis ©Felipe Mendes

Ici, je suivais des cours avec Marie-Hélène Pandèle Govignon (lespaceyoga.fr), qui un beau jour m’a invitée à la remplacer parce qu’elle allait déménager à Bordeaux. Je voulais approfondir mon yoga depuis longtemps, je pensais déjà à donner des cours mais je n’avais pas les moyens pour commencer, alors Marie-Hélène m’a ouvert les portes. Je la remercie infiniment pour son encouragement fondamental et son exemple.

Pour pouvoir reprendre son groupe d’élèves, je me suis tout de suite inscrite à une formation de professeur à Lisbonne qui est agréée par la Yoga Alliance International, créée et basée en Inde (à ne pas confondre avec la Yoga Alliance tout court, créée et basée aux États Unis). L’école à Lisbonne est un intermédiaire qui suit les standards internationaux et le certificat est donné directement par Sri Swami Vidyanand, le président fondateur de la Yoga Alliance International. Naturellement, un certificat, ce n’est ni le début ni la fin d’une formation, une véritable formation en yoga se fait tout au long de la vie, tous les jours.

5. Quelles sont tes sources d’inspiration au quotidien ?

B. E. : La méditation !

Sinon, pour parler de l’inspiration venue de l’extérieur, à part mes lectures quotidiennes à propos du yoga, ces dernières années je me mets à dénicher les boutiques en France qui proposent des produits de qualité venus d’ailleurs, issus du commerce éthique, fabriqués à la main. Je les repère quand je me promène dans les centre-villes et je les suis sur les réseaux sociaux.

Lors de mes derniers voyages, j’ai vraiment commencé à observer les pratiques des commerces. Que ce soit à Paris ou à Londres, à Lisbonne ou à Porto, à Brasília ou à Recife, il y a heureusement un mouvement de plus en plus fort qui cherche une consommation plus responsable, respectueuse de l’environnement et de l’homme, qui revalorise le fait-main et les matières naturelles. C’est dans cet esprit que j’ai lancé Jatobá Design.

6. Une rencontre inoubliable qui a tout changé pour toi ?

B. E. : Ahhh… à Florence, cette ville italienne absolument magnifique. J’ai rencontré celui qui allait devenir l’homme de ma vie, le père de mes enfants. C’était un peu cinématographique, dans un après-midi de l’été 2008, aux Galeries Uffizzi, dans la salle dédiée à Botticelli. Cette rencontre allait provoquer un bouleversement silencieux et progressif dans ma vie, avec un changement de pays, de profession, de style de vie et surtout un changement de perspective. Sans faire exprès, il m’a aidée à voir le monde à travers un point de vue drastiquement différent de ce que j’avais l’habitude de voir.

7. Un truc dont tu es la plus fière ?

B. E. : Celle-là est la plus facile et je vais répondre comme Damien Artero : mon petit yogi voyageur Marco et ma petite yogini voyageuse Clarice !

Session yoga à Brasília ©Rosana Evangelista

Session yoga à Brasília ©Rosana Evangelista

Sans aucun doute, ils sont le plus beau projet de ma vie, ils lui ont donné vraiment un sens. Lui, « du haut » de ses 5 ans, connait déjà 4 pays et elle, dans sa première année, est déjà partie avec nous dans 2 pays. Évidement, ce ne sont pas ces chiffres qui importent, ce qui compte c’est l’ouverture d’esprit et la conscience de la diversité que l’éducation bilingue et multiculturelle leur confère.

8. As-tu des projets de voyage dans les cartons ?

B. E. : Je dois attendre que nos enfants soient beaucoup plus grands pour partir en Inde pour un séjour à la SriMa International School of Transformational Yoga, pour continuer ma formation, auprès de Sri Swami Vidyanand.

En famille, plus prochainement, nous avons bien l’intention d’oublier le monde sur les plages de l’état de Alagoas. La dernière fois j’y suis seulement passée en autocar et j’ai pu voir par la fenêtre l’océan vert émeraude translucide comme nulle part au Brésil !

9. Pour finir, quel est ton rêve le plus fou ?

B. E. : Le plus fou… je ne sais pas… mais je veux arriver à 90 ans tout en donnant des cours de yoga !

Merci d’avoir répondu à mes questions Belisa !

B. E. : Merci Magali pour cette belle opportunité de réfléchir à ces questions et merci de tout cœur pour ton intérêt.


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